La forêt amazonienne fait beaucoup parler d’elle en ce moment. Selon le journal Le Monde mais également selon de nombreux autres médias, la forêt amazonienne est ravagée par des incendies d’une ampleur inédite, et ce depuis plusieurs semaines. Sans nier les feux ni l’importance de cette forêt au niveau de sa biodiversité, nous tenons à dénoncer quelques contre-vérités qui ont circulé.
1/ La forêt amazonienne n’est pas le poumon de la planète
Scientifiquement, l’expression « poumon de la planète” pour désigner l’Amazonie est fausse et prétendre que l’Amazonie produit 20% de notre oxygène — une assertion du Président français Macron lors du récent sommet du G7 — est fausse. Tout d’abord un poumon ne produit pas d’oxygène mais en consomme… Mais passons ce détail. Ce qu’il faut retenir est ceci : le bilan entre photosynthèse et respiration pour cet écosystème est nul du point de vue de l’oxygène [1] . La forêt amazonienne ne produit donc quasi pas d’oxygène, tout comme les océans, lorsque l’on considère le bilan net (photosynthèse + respiration). Tout ceci est même rappelé sur la page Wikipedia consacrée à la forêt amazonienne, ou encore sur le site web du National Geographic.
Pour ceux qui ont du mal à lire en anglais, vous pouvez également lire le site français du Huffington Post, cette page de Planet Terre écrite en juin 2000, ou cet article écrit dans Le Parisien.
Pour ceux qui se posent la question de l’origine de l’oxygène que nous respirons (21% dans l’atmosphère actuelle), voici la réponse : nous respirons essentiellement un O2 libéré par des végétaux anciens (par exemple datant du Carbonifère) devenus matière organique fossile (ce carbone n’est pas dégradé par les bactéries des sols et sédiments et donc ne consomme pas d’oxygène atmosphérique). La page de Planet Terre citée précédemment explique parfaitement ce phénomène.
2/ Les incendies en Amazonie ne sont pas un phénomène nouveau
Comme l’écrit la chercheuse Martine Droulers sur le site du Nouvel Observateur, on observait beaucoup plus de feux en Amazonie il y a 20 ans qu’aujourd’hui. Vingt mille kilomètres carrés brûlaient en moyenne chaque année! Le site web de Libération nous informe d’ailleurs que le nombre de feux enregistrés et la surface brûlée dans la région amazonienne sont loin des records enregistrés en 2004, 2005, 2007 et 2010 (Figure 1). La plupart des feux sont en périphérie de la forêt, sur des terres qui ont déjà été défrichées par le passé et où les paysans pratiquent traditionnellement le brûlis. Notons également que les incendies de forêts sont bien connus à l’échelle géologique et régulièrement rencontrés à travers toutes les époques depuis que les forêts existent (ici pour un rapide aperçu, et par exemple ici pour la fin du Dévonien, ou ici pour le Permien).
Figure 1. Nombre de feux de forêt au Brésil entre 2004 et 2019. Source : Libération.
3/ Les incendies de forêt sont NATURELS pour l’écrasante majorité d’entre eux
Les forêts se consumeraient en été même s’il n’y avait pas un seul humain à la surface de la Terre et le phénomène est mondial comme on peut le voir sur ce site de la NASA où l’essentiel des feux a lieu en Afrique. C’est également ce que montre la présence des incendies de forêts détectés dans les séries géologiques depuis l’Ordovicien, quand sont apparues les forêts il y a un peu plus de 450 millions d’années (voir ci-dessus).
4/ Exagérations médiatiques
Finalement, comme discuté sur le site Belgotopia, l’avalanche d’articles, de photos et d’avis de personnalités de tous horizons sur les incendies qui ravagent l’Amazonie constitue une illustration parfaite du boulot (peu honnête) de désinformation (habituelle ?) et de manipulation de l’opinion publique exercée par les médias, et porteur de l’amalgame trompeur diffusé jour après jour entre protection de l’environnement et réchauffement climatique. Décidemment l’amalgame climat, environnement et pollution est devenu le lot quotidien de ceux qui raisonnent en privilégiant les raccourcis les plus rapides qui soient ou tout simplement de ceux qui ne raisonnent plus. A titre d’exemple rappelons les ‘terribles’ incendies de Californie de 2017 rapidement mis sur le compte du climat, alors qu’il a été montré qu’ils étaient principalement dus à un mauvais entretien des forêts (manque de coupe-feux, prolifération des broussailles etc., voir ici). En attendant que de déballage médiatique avec images tournant en rond sur toutes les télévisions de la planète… Bien entendu, pas de rectification après…
5/ Pour aller plus loin
Un abondante littérature sur les récents feux amazoniens (et d’autres en Europe, en Californie etc.) et sur la concentration de l’oxygène au cours des temps géologiques est disponible. Il est impossible de tout reprendre ici, la partie consacrée à l’oxygène sera bientôt reprise en détail dans SCE à partir de l’analyse des séries précambriennes. On peut notamment consulter :
https://www.livescience.com/amazon-fires-are-not-depleting-earth-oxygen.html
https://nofrakkingconsensus.com/2019/08/28/fake-news-and-fires-in-the-amazon/
https://wattsupwiththat.com/2019/08/23/amazon-fire-history-since-2003/
https://wattsupwiththat.com/2019/08/23/amazon-fires-update/
https://notalotofpeopleknowthat.wordpress.com/2019/03/28/wildfires-declining-in-southern-europe/
NASA: Global Wildfires Have Dropped 25% Since 2003
http://www.science-climat-energie.be/loxygene-un-poison-pendant-plusieurs-milliards-dannees/
…
Enfin on peut se référer à la section ‘Canicules et Feux’ dans la rubrique ‘From Outside’ de SCE.
Note
[1] François Ramade, Éléments d’écologie, Dunod, 2009, p. 415.